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SÉCURITÉ ROUTIÈRE

2 ROUES ET 4 ROUES Amis ou ennemis ?

Denis Corriveau1

Avec l’arrivée du printemps, cyclistes et motocyclistes enfilent de nouveau leur casque et enfourchent leur monture avec la hâte de revivre leurs plus  beaux moments de l’année. Plusieurs d’entre eux revêtent aussi leur cape d’invincibilité,
mais ça ne fonctionne malheureusement pas.

Hélas, leur élan d’enthousiasme se heurte parfois à la témérité hasardeuse de certains automobilistes et piétons qui négligent de réviser leurs devoirs de courtoisie en leur égard.

Le meilleur des mondes serait une saine cohabitation de tous les utilisateurs de l’espace public si tous assumaient leurs responsabilités de partager cet espace avec patience et prudence.

Pour cela, il suffit que chacun manifeste un comportement coopératif plutôt que compétitif. Comment ? En prenant conscience de ses propres enjeux, et de ceux de son vis-à-vis, tout en respectant les règles de sécurité qui lui reviennent. On ne réinvente pas la roue :
anticiper les comportements fautifs d’autrui et poser des gestes préventifs conséquents demeure la règle cardinale qui repousse le risque de collision.

Voyons quelques-unes des particularités associées à ce groupe parmi les plus vulnérables.

Les cyclistes

La bicyclette semble le moyen de transport idéal : écolo, économique, silencieux et santé. Rien d’étonnant à ce que 54 % des Québécois fassent du vélo pour le travail, pour le plaisir, pour l’exercice ou pour toutes ces raisons à la fois. Nul n’est contre la vertu, à commencer par les paliers gouvernementaux et municipaux qui aménagent des pistes et des bandes cyclables. Des feux et des panneaux de circulation exclusifs sont d’ailleurs installés pour répondre à leurs besoins distinctifs.

Les profanes et les habitués de ce moyen de locomotion sont évidemment de tout âge, de toute expérience et d’une vigilance variable. La plupart demeurent sur leur garde, réalisant que leur vie ne tient qu’à deux petites surfaces de caoutchouc précairement accrochées au sol et… aux manœuvres des automobilistes qui les entourent.

Ce que l’automobiliste doit faire face aux cyclistes pour réduire  les risques :

• leur allouer une prévenance supplémentaire, surtout le soir et la nuit;
• démontrer une bonne contenance de leur présence et de leurs maladresses;
• repérer avant eux les nids-de-poule et les flaques d’eau qu’ils pourraient brusquement devoir éviter en se projetant devant soi;
• les prévenir d’un dépassement avec un klaxon amical au besoin;
• signaler son intention de les doubler pour que les conducteurs qui suivent sachent qu’ils auront à faire un écart eux aussi;
• laisser un espace de sécurité lors d’un dépassement, car à vitesse élevée, la turbulence produite par le véhicule peut être une source de déséquilibre troublant;
• maintenir la fidèle habitude de jeter un coup d’œil aux angles morts lors des virages aux carrefours;
• avant de sortir de la voiture stationnée en bordure du trottoir, interroger du regard les rétroviseurs et les angles morts de manière à s’assurer de l’absence de tout ce qui roule.

Obligations légales envers les cyclistes

Le Code de la sécurité routière précise certaines obligations des conducteurs de véhicules motorisés à l’égard des cyclistes. Voici trois normes à connaitre :
• Emportiérage : Nul ne peut ouvrir la portière d’un véhicule routier à moins que ce véhicule ne soit immobilisé et sans s’être assuré qu’il peut effectuer cette manœuvre 
sans danger. (Article 430)
• Dépassement d’un cycliste : Le conducteur d’un véhicule routier ne peut dépasser un cycliste à l’intérieur de la même voie de circulation, à moins qu’il ne puisse le faire sans danger après avoir réduit la vitesse de son véhicule et après s’être assuré qu’il peut maintenir une distance raisonnable entre son véhicule et le cycliste lors de la manœuvre. […] Est une distance raisonnable 1,5 m sur un chemin dont la limite de vitesse maximale autorisée excède 50 km/h ou 1  m sur un chemin dont la limite de vitesse maximale autorisée est de 50 km/h ou moins. (Article 341)
Principe de prudence : Tout usager de la route est tenu, surtout à l’égard de celui qui est plus vulnérable que lui, d’agir avec prudence et respect lorsqu’il circule sur un chemin public. Le conducteur d’un véhicule routier est tenu de faire preuve d’une prudence accrue
à l’égard des usagers plus vulnérables, notamment les personnes à mobilité réduite, les piétons et les cyclistes. L’usager vulnérable est, pour sa part, tenu d’adopter des  comportements favorisant sa sécurité. (Article 3.1) 

Les motocyclistes

Les lecteurs qui font occasionnellement de la motocyclette, ou qui ont déjà fait partie de cette grande famille, savent par expérience que conduire un deux-roues, c’est vivre à tous les instants avec le risque. Comme les cyclomotoristes, ils sont contraints à demeurer constamment aux aguets pour éviter les collisions. Aussi, sont-ils tenus de suivre
un cours de conduite théorique et pratique pour obtenir leur permis. L’accent y est mis sur le respect des lois et des préceptes de la sécurité, nommément, sur la notion de tout voir et d’être vu par tous.

Ce qu’il faut faire pour réduire les risques

Pour les motocyclistes et les cyclomotoristes : porter des vêtements et un casque de couleur claire ou fluorescente;
Pour la motocyclette : installer, près des rétroviseurs et dans le bas de la fourche, un modulateur de phares et des feux d’appoint conformes à la règlementation. Également, choisir idéalement une moto de couleur voyante;
Pour le cyclomoteur : ajouter des feux d’appoint à l’avant et à l’arrière.

Les couleurs les moins visibles

Le Centre de recherche des accidents de l’Université de Melbourne a passé en revue les
données de près de 900 000 collisions pour déterminer quelles sont les couleurs de véhicule les plus à risque, par rapport à un véhicule blanc. Par ordre croissant, les couleurs dont l’indice de probabilité de collision est le plus grand sont le rouge, le bleu, le gris pâle, le gris foncé et le noir (+12 %).

Surpuissance du moteur pour un petit gabarit

Il n’y a pas à chercher midi à quatorze heures, la surpuissance du moteur pour un si petit gabarit oblige :
Les autres usagers de la route à scruter attentivement leur environnement pour repérer
à distance les motocyclistes manifestement plus difficiles à déceler ;
Les motocyclistes à scruter attentivement leur environnement pour repérer à distance les usagers qui les voient manifestement arriver sur le tard ou pire qui ne les voient pas du
tout.

Étonnamment, plusieurs motos sont plus puissantes que les voitures de course de Formule
1 en raison de la force motrice transmise au pneu pour chaque centimètre carré en contact au sol. Vous trouverez les caractéristiques et les marques des motocyclettes les plus à risque sur le site de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) en y claviotant motos à risque.

Les mordus de révélation du risque accru ne seront pas surpris d’apprendre que selon l’organisme Sécurité routière, il y a 27 fois plus de risques d’être tué à motocyclette qu’en
voiture. Leur slogan : À moto, le plus grand danger, c’est de penser qu’il n’y en a pas. Que rajouter, sinon que la formule s’applique aussi à ceux qui se situent de l’autre côté du guidon ?

Bonne route et bon partage.

NDLR. Le lecteur pourra aussi être intéressé par : Plaisir en moto. Oui mais tout habillé, par JeanPierre Gauvin, Travail et santé, septembre 2018.


1 – Denis Corriveau – AUTEUR ET FORMATEUR EN SÉCURITÉ ROUTIÈRE  [denis.corriveau@outlook.com]

Références bibliographiques

  1. Lamonde, F. (1995) L’ergonomie et la participation des travailleurs. Dans Blouin R, Boulard R, Lapointe P.A., Larocque A, Mercier J, Montreuil S (Eds) La réorganisation du travail, Actes du Le congrès des relations industrielles de l’Université Laval, 2-3 mai : Québec, p.147-163.
  2. Dugué B., Petit J. et Daniellou F (2010). L’intervention ergonomique comme
    acte pédagogique, PISTES, 12, 3.