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SÉCURITÉ ROUTIÈRE

LA CONDUITE ESTIVALE

Plaisir et déplaisir

Denis Corriveau1

Penser été fait inévitablement rêver à la conduite les cheveux au vent. C’est aussi le temps  des vacances et des longs week-ends. Le bonheur total…ou presque.

Les aficionados (grands amateurs) de voitures anciennes savent que cette période de
l’année est synonyme de musée sur route et de vrombissantes parades de voitures musclées à profil sur-surbaissé. C’est aussi durant cette période estivale que l’on
rencontre des hordes de touristes qui n’ont pas les yeux assez grands pour tout voir. C’est également ou en construction et celle des insectes agglutinés au parebrise.

N’oublions pas la faune saisonnière que constituent les caravaniers, motocyclistes, cyclistes, joggeurs, planchistes, patineurs à roues alignées, utilisateurs de quadriporteur,
enfants surgissant de nulle part et chauffeurs de machineries agricoles. Ils
répondent tous Présent pour permettre au conducteur d’affuter à souhait les deux nobles qualités que sont la vigilance et le respect.

Qui plus est, l’été, l’alcool coule souvent à flots. Malheureusement, Opération Nez rouge n’opère pas à la sortie des festivals. Par temps chaud, les trompe-la-mort pullulent dans
ce qui devient une jungle bitumineuse. Précisément parce qu’il fait beau et chaud, ils roulent plus vite, se croyant tout permis. Sans surprise, ce sont les mois de juillet et
aout qui connaissent le plus grand nombre de collisions mortelles.

Du reste, des chercheurs américains avan cent que l’été, l’accroissement de la température
aug mente l’agressivité en raison de l’inconfort qui lui est lié et de son incidence sur la patience. On a d’ailleurs observé qu’une élévation d’un degré Celsius augmente de 4 % le nombre de crimes contre la personne. Un argument supplémentaire pour utiliser la climatisation des véhicules.

Aujourd’hui, je lève le voile sur quelques désagréments que procurent le soleil, la chaleur et les orages dont le cours de l’été est ponctué.

Le soleil

La présence du soleil génère de grands bienfaits au moral, au cœur et elle agit contre certains cancers, à la condition de ne pas en abuser. Plusieurs jours par année, le soleil est aussi une source importante d’éblouissement qui cause inconfort et aveuglement. Pour s’en protéger, le geste instinctif de chacun est d’abaisser la visière du pare-soleil. Mais c’est insuffisant. L’éblouissement provient aussi de la réfraction des rayons sur les édifices, les carrosseries des véhicules et l’écran tactile du tableau de bord.

Il s’avère alors précieux de porter des lunettes protectrices conformes aux normes optométriques. Leurs avantages sont nombreux : ils améliorent la vision, réduisent la
fatigue des yeux, permettent une récupération plus rapide lors d’éblouissements nocturnes la noirceur venue et préviennent certaines anomalies comme la cataracte et la dégénérescence maculaire (DMLA).

Bien choisir ses lunettes de soleil

Les verres des lunettes de soleil doivent couper à 100 % des rayons UV. L’étiquette peut être trompeuse si elles ont été achetées dans un bazar ; en cas de doute, il vaut mieux opter pour une vérification chez un spécialiste. C’est gratuit.

Les lentilles des lunettes à teinte variable (ou photochromiques) perdent leur propriété d’assombrissement à l’intérieur du véhicule. En effet, la plupart des parebrises sont traités pour couper les rayons qui déclenchent le processus. Il est préférable d’utiliser des clips, des surlunettes solaires de qualité ou une paire de rechange.

Les lunettes avec de larges branches sont franchement antisécurité routière. Bien qu’elles réduisent la luminosité latérale, du même coup, elles coupent la vision périphérique, augmentant d’autant les angles morts du conducteur.

Les lunettes à lentilles jaune pâle ? Les fabricants leur attribuent certains bénéfices dans
un environnement ombrageux, comme par temps pluvieux, nuageux et brumeux. Toutefois, en plein soleil, elles donnent un faux sentiment de protection, alors que la pupille des yeux demeure ouverte au passage des rayons dommageables. De plus, elles voilent tout ce qui est jaune : lignes médianes, marques de passages de piétons, panneaux indicateurs de danger, et tous ceux qui sont habillés de jaune. Pire encore, elles n’atténuent pas la fatigue
visuelle, exigeant plutôt un effort supplémentaire pour s’adapter à cette couleur étrangère.
Il ne faut d’ailleurs jamais porter ce type de lunettes la nuit, car elles diminuent la visibilité
de la partie la plus sombre de la route nous informe la Sunglass Association
of America.

Dans le même sens, l’American Automobile Association révèle que ces verres
affaiblissent la vision de nuit en général.

Ternissement des phares

Les rayons ultraviolets du soleil, de même que la projection de débris et d’abrasifs, font ternir et jaunir les surfaces de phares en polycarbonate. Leur opacification peut atteindre 50 % et réduire d’autant la perception des indices de la route et la capacité d’être
repéré par les autres, de jour comme de nuit. En déplacement nocturne, cela signifie que le conducteur pourra prendre jusqu’à quatre secondes de plus pour réagir à une urgence.

Les trucs maison pour restaurer les faisceaux lumineux regorgent sur Internet, mais leur efficacité est souvent douteuse et temporaire. Si l’éclairage du véhicule est devenu un problème, je conseille de faire appel à un spécialiste pour les rafraichir. Pour un cout minime, celui-ci obéit à un protocole précis en garantissant le retour à leur propriété
originale.

Voilà un bon moyen d’améliorer sa sécurité et de redonner un coup de jeunesse à ses phares.

La chaleur

Davantage que le froid sibérien, la chaleur torride de l’été est l’ennemi juré de plusieurs composantes du véhicule, notamment la batterie, l’habitacle et le pneu, ce dernier élément ayant été traité dans ma précédente chronique.

La batterie

Si la température de fonctionnement idéal de la batterie du véhicule est d’environ 27 °C,
elle monte à plus de 60 °C quand il fait 32 °C à l’extérieur. Il en résulte une décharge pouvant occasionner une irréversible perte de capacité. La seule chose à faire, c’est
de faire vérifier son état de fonctionnement lors de la mise au point et de s’en procurer
une neuve au besoin.

L’habitacle

Une expérience réalisée par la CAA-Québec a démontré que la température à l’intérieur d’un véhicule stationné atteint 100 °C lorsque celle de l’extérieur grimpe à 40 °C. Il est donc faux de croire que conserver une fenêtre entrouverte suffit à dissiper la chaleur.
Il importe à fortiori de ne pas laisser d’enfants ou d’animaux dans le véhicule, même
pour un court instant. Évitons de déposer sur le tableau de bord ou dans le coffre à gants :
téléphone, lunettes avec traitement antireflet, tablette numérique et boite de chocolat aux cerises.

Les orages violents

Alors que le nombre et la puissance des perturbations météorologiques
s’accentuent en raison des changements climatiques, chaque été nous sommes
témoins de violentes cellules orageuses. La sécurité est mise en cause quand des trombes
d’eau s’abattent sur le véhicule, pendant que les éclairs fusent et que les coups de tonnerre
éclatent.

Comme lors des autres intempéries, la visibilité et l’adhérence sont rudement
compromises. Et ce n’est que la pointe de l’iceberg. Les orages sont accompagnés de vents intenses.

Aussi, la stabilité du véhicule se fragilise et le danger de voir apparaitre des objets poussés par les fortes bourrasques d’eau ou de grêle est omniprésent.

Le conducteur qui décide de ranger son véhicule durant un orage diluvien doit le stationner
loin d’une ligne électrique, bien qu’il soit rare que la foudre le heurte directement. En outre,
à moins que l’automobile ait un toit en toile ou en fibre de verre, sa structure métallique
le protège en fragmentant l’éclair pour le diriger au sol. Il est donc faux de croire que les pneus (le caoutchouc) servent d’isolant. Dans ces circonstances, il est indiqué de ne pas toucher les parties métalliques de l’habitacle.

En guise de conclusion

Pour réduire les risques, il est primordial d’adapter sa conduite à ces conditions météorologiques en adoptant les comportements adaptés aux situations rencontrées.
• Ralentir, parce qu’en raison de la réduction de l’adhérence, les distances de freinage
• Éviter de rouler dans les ornières, de même que les trous d’eau dont on ignore  la
profondeur.
• Aligner de préférence les pneus dans les traces laissées par ceux du véhicule devant.
• Augmenter la distance avec le véhicule qui précède pour parer à un important et soudain
ralentissement de la circulation, une pratique qui améliore en plus la visibilité.
• Allumer les feux de croisement (les basses), même en plein jour, pour être
repéré de loin.
• Ne pas utiliser le régulateur de vitesse.
• Se méfier des autres conducteurs moins expérimentés et moins attentifs.
• S’immobiliser dans un endroit à l’écart de la circulation en actionnant les feux de détresse quand le déluge empêche de distinguer ciel et terre.

Bon été et bonne route.


  1. Denis Corriveau – AUTEUR ET FORMATEUR EN SÉCURITÉ ROUTIÈRE [denis.corriveau@outlook.com]
NDLR. Ce texte est tiré du livre ABC de la conduite préventive d’un véhicule de police, par Denis Corriveau