La PUISSANCE de l’influence


La PUISSANCE de l’influence

Sommes-nous en mesure d’apprécier toute la puissance de l’influence au sens managérial ? Sommes-nous totalement conscients des conséquences de dire une chose et d’en faire une autre ? Quelle importance revêt les comportements d’un décideur, d’un superviseur, d’un travailleur sur la prévention des accidents et des maladies professionnelles ?

Marie Laberge

En management, on associe souvent l’influence à la rigueur. Il est vrai qu’une personne rigoureuse et qui en fait preuve aura pour résultat d’envoyer un message à l’effet qu’elle est en maitrise. De par ses décisions et ses actions, elle insufflera auprès des personnes qui la côtoient de la discipline et de la cohérence. Son potentiel d’influence positive sera alors très élevé par rapport à une personne moins rigoureuse.

Par ailleurs, il est aussi vrai d’admettre que pour être rigoureux, il faut de la rigueur! Blague à part, la rigueur se définit comme étant le «caractère de quelqu’un, de quelque chose qui se distingue par une exactitude, une logique, une précision parfaites» (1). Cette définition est lourde de sens et il peut s’avérer difficile pour certains d’y adhérer ou d’y accéder à court terme; cela pouvant ne pas être intrinsèque à la personnalité. En attendant d’atteindre cette condition idéale, il est tout de même possible d’influencer et de contribuer positivement à l’essor de la prévention.

Qui peut influencer?

Tout le monde a de l’influence sur les conditions et les personnes, cela étant vrai en SST comme dans d’autres domaines d’ailleurs. C’est comme l’effet papillon où une modification infime des conditions initiales peut entrainer des résultats imprévisibles sur le long terme (2). En effet, toute personne évoluant dans un environnement de travail a de l’influence sur les conditions et les personnes, et cela est vrai dans la négative comme dans la positive. C’est selon cette dernière perspective que le sujet sera d’ailleurs traité. En effet, tel que vu dans un article précédent (3), l’approche positive s’avère plus constructive en matière d’obtention de comportements organisationnels et humains sécuritaires. Voici quelques applications du phénomène en regard à l’influence d’une personne sur les autres et sur les conditions au sein d’une organisation.

Un président d’entreprise sera sous la loupe de ses vice-présidents et de ses directeurs généraux au moment d’analyser une situation et de prescrire les orientations SST en comité. Un ingénieur responsable de la recherche et du développement de produits et de procédés sera imputable des risques qu’il aura à gérer avant, pendant et après un changement. Un travailleur d’expérience qui accompagne un étudiant pour un nouvel emploi d’été servira de référence à l’égard des méthodes de travail qu’il lui transmettra. Et que dire du poids qui pèse sur l’intervenant qui porte le «chapeau» de la SST au sein d’une organisation?

Tous sont susceptibles d’engendrer une modification aux conditions et aux personnes sous leur influence de par leurs décisions et leurs actions. Il suffit d’en prendre conscience. Et la situation demeurera la même en inversant les exemples mentionnés précédemment. En effet, des vice-présidents et des directeurs généraux qui analysent et font des recommandations au président contribueront à ce qu’il prenne une meilleure décision. Des travailleurs, superviseurs et responsables de l’entretien préventif qui participent à l’analyse des risques et des contrôles tout au long du processus de gestion de changement, allègeront la responsabilité de l’ingénieur chargé du projet. Un étudiant qui discute avec son accompagnateur de ce qu’il a appris à l’école en matière de maitrise des différentes sources d’énergie transfèrera ses connaissances toutes fraiches à une personne d’expérience. Et finalement, un travailleur qui rappelle à l’intervenant SST qu’il a oublié son «chapeau» tout juste avant d’accéder à une zone de construction, contribuera à le protéger et à préserver sa crédibilité.

Comprendre

En être conscient certes, mais il faut également saisir toute l’importance de la détermination des rôles et des responsabilités au sein d’une organisation. Cette condition gagnante prend d’ailleurs tout son sens lorsqu’il est question d’influence sur les conditions et les personnes. La détermination des rôles et des responsabilités précise qui fait quoi et comment dans le but d’assurer la cohérence organisationnelle. Cependant, dans la majorité des organisations, cette condition gagnante présente des lacunes importantes qui compromettent l’atteinte de la cible. En effet, les personnes croient trop souvent que le fait d’écrire ou dire une chose suffit à comprendre les attentes et à les mettre en œuvre adéquatement. Malheureusement, non.

Pour bien jouer son rôle et influencer positivement, il faut connaitre, comprendre et savoir appliquer ce qui est de notre ressort.

Les personnes qui doivent décider et mettre en application les attentes SST doivent par conséquent bénéficier de politiques claires, de formations ciblées, de conférences et de communiqués de sensibilisation de toute sorte et cela, en plus de bénéficier d’un programme d’accompagnement par des ressources internes ou externes crédibles et compétentes. Pour être complète et pérenne en regard de la volonté de transmission des connaissances en savoir-faire et en savoir être, cette démarche aura avantage à être simple et l’accompagnateur, communément nommé coach, devra posséder des qualités de guide, de communicateur et d’ouverture à apprendre des autres. C’est à ces seules conditions que tous, même les moins rigoureux, pourront s’inscrire dans leur rôle respectif de décideurs de manière avertie, et mettre en application leurs responsabilités dans la cohérence souhaitée. Tous deviendront à leur tour de bons accompagnateurs pour les personnes qui les côtoient.

L’observation et la communication

À la base de l’influence, vient la capacité d’observer et de communiquer et inversement, être capable d’être observé et d’être abordé. C’est précisément ce qu’un bon accompagnement visera à développer chez la personne. L’observation et la communication sont à la base de l’influence puisqu’il y une obligation de constater toutes les conditions et tous les comportements à risque et sécuritaires pour pouvoir les considérer de façon cohérente dans ses décisions, ses actions et ses communications. Si vous ne vous attardez pas à une situation de danger et que vous la contournez, les personnes autour de vous qui vous auront vu ou entendu, ne sauront pas si effectivement ou non vous avez constaté le danger en question. Certaines pourront alors en déduire que vous l’avez vue ou entendue, et l’avez tolérée. D’autres diront que vous ne l’avez pas vue ou entendue, et auront préféré ne pas vous en aviser. Et dans ce dernier cas, vous auriez été en droit de vous attendre à ce qu’elles vous en protègent, en vous avisant du danger qu’elles mêmes ont pu constater.

La responsabilité de conserver l’attention sur ce qui nous entoure tous, physiquement ou mentalement, est par conséquent majeure pour en assurer la communication et demeurer crédible. Ce n’est toutefois pas une fin en soi puisque plus le principe d’observation et de communication collectif au sein d’une organisation sera fiable, plus ce souci pour autrui et d’entraide entre les personnes contribuera à en réduire la pression individuellement. Vous constaterez alors toute l’importance de la réciprocité qui entoure la question de l’influence, toute l’importance des enjeux d’observation et de communication, horizontalement et verticalement, sans égard à la notion de supervision.

Et qu’en est-il du droit à l’erreur? L’influence ne doit surtout pas être perçue comme une obligation de perfection et de résultat. La réponse parfaite aux attentes, peu importe leur provenance, est utopique en soi. Comme la paix dans le monde l’est d’ailleurs! Est-ce toutefois une bonne raison pour ne pas chercher à l’atteindre? Bien sûr que non. Le problème n’est pas le fait que l’erreur soit possible. Le problème réside dans le fait que l’erreur soit tolérée. Si vous portez une attention particulière à la fiabilité de votre processus d’observation et de communication à courts et moyens termes, et ce, tout au long de son déploiement, il vous conduira aisément à des résultats durables à long terme. Vous n’aurez alors qu’à constater positivement les bénéfices, et vous serez en mesure d’en comprendre les enjeux et d’améliorer votre processus en continu.

Conclusion

La puissance de l’influence n’est plus à faire. Seules les organisations qui s’inscrivent dans une telle démarche sont en mesure d’assurer leur pérennité économique et humaine. Il s’agit là d’une approche conviviale et qui s’intègre très bien aux autres axes et fonctions de l’organisation. Qui plus est, elle permet de développer chez les personnes des habiletés transférables d’altruisme, minimisant le besoin de supervision (4). Encore une fois, tout cela est fait dans le but d’en obtenir plus en faisant plus efficacement et pour une charge moindre, tel qu’expliqué dans l’article précédent (5). Cela nous permettra d’en arriver ultimement à atteindre une culture durable d’interdépendance où il fait bon travailler pour une organisation performante et concurrentielle.


Références bibliographiques

1. [www.larousse.fr] consulté le 4 mars 2016

2. [https: //fr.wikipedia.org/wiki] consulté le 8 mars 2016

3. Laberge, M. (2015) Approche comportementale. Travail et santé,  31 (3), 6-8

4. Laberge, M. (2016) Cessez de lutter contre les règles, influencez! Conférence

5. Laberge, M. (2015) Briser les paradigmes. Travail et santé, 31 (4), 36-38[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]