MAL DE DOS Mal du siècle
Qualifié de mal du siècle, le mal de dos touche des millions de personnes. On croit souvent à tort que celui-ci ne touche que les personnes âgées et les adultes. En réalité, les enfants peuvent eux aussi en être atteints. La prévention s’impose donc pour tous.
Kathleen Gagné-Doyon
Ce pourrait-il qu’après quatre-millions d’années d’évolutions, l’Homme ne soit toujours pas parfaitement adapté à sa position verticale.
On estime que 80% des gens seront amenés à souffrir d’un mal de dos au cours de leur vie et chaque année, environ 15 à 20% des adultes souffrent de douleurs lombaires, représentant ainsi l’une des principales causes de handicap dans la population active (1).
Même en dehors des cas graves, souffrir du dos peut amener ceux qui en sont victimes à quitter le travail. Ce qui est très attentatoire pour les personnes souffrantes et qui peut aussi être couteux pour notre société. Le site web de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST)nous apprend qu’au Canada, les lésions vertébrales représentent la cause la plus fréquente d’indemnisation des travailleurs. Au Québec, les plus touchés proviennent des services médicaux et sociaux, des activités de commerce et des secteurs du bâtiment et des travaux publics (2).
Causes véritables
Certes, notre mode de vie de plus en plus sédentaire s’ajoutant à un rythme effréné ne met personne à l’abri des maux de dos. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 60 % de la population n’atteint pas le niveau d’activité physique recommandé pour favoriser une bonne santé. Certaines personnes peuvent y être plus vulnérables, soit les 45 ans et plus, celles travaillant assis toute la journée devant l’ordinateur ou restant dans un véhicule sur de longs trajets, les travailleurs appelés à manutentionner de lourdes charges, les athlètes, ainsi que les femmes enceintes. Notre dos est continuellement sollicité pour se lever, s’assoir, se pencher, porter, se tourner, etc. Ces maux de dos peuvent survenir soudainement ou bien se développer lentement.
Parmi les causes des problèmes de dos, n’oublions pas les anomalies de la colonne vertébrale telle que la scoliose, les postures inadéquates, la mauvaise exécution des mouvements, les changements hormonaux, un accident, le tabagisme et une alimentation favorable au surpoids et nuisible aux articulations. Le stress répété avec lequel nous vivons peut également participer à la survenue des maux de dos et à sa chronicisation. Enfin, on retrouve l’usure des articulations et des disques successive au vieillissement. On constate donc que l’hygiène de vie, le stress et l’alimentation sont largement mis en cause.
Lombalgie, dorsalgie ou cervicalgie
Selon le point d’origine de la douleur, on différencie les cervicalgies, les dorsalgies et les lombalgies. Le suffixe algie, dérivé du grec algos signifie douleur. Les lombalgies sont donc des douleurs de la région constituée par les cinq vertèbres lombaires, ce qui correspond au rachis lombaire. Une dorsalgie est une douleur dans la région thoracique et une cervicalgie est une douleur dans le cou. Les lombalgies sont les plus fréquentes considérant que la région lombaire est la plus mobile en flexion et extension, en plus d’être soumise aux contraintes de poids les plus sévères. Elles sont particulièrement fréquentes chez les travailleurs manuels, alors que les cervicalgies touchent davantage les personnes qui travaillent dans des bureaux. Notez que nous parlerons particulièrement dans ce texte de la lombalgie.
On distingue deux origines principales : soit les lombalgies d’origine mécaniques causées par une détérioration des constituants de la colonne vertébrale et celles d’origine inflammatoires dues au développement d’une maladie auto-immune sous-jacente comme la spondylarthrite. Les douleurs d’origine mécanique sont les plus fréquentes et ces facteurs peuvent endommager les vertèbres, disques, capsules, ligaments, ou muscles de la colonne vertébrale. Ce type de lombalgies peut néanmoins être très varié et peut se présenter sous les formes d’arthrose, d’entorse lombaire, de discopathie dégénérative, d’ostéoporose, de hernie discale, ou est la conséquence d’une malformation congénitale de la colonne vertébrale.
Repos ou activité
Souvent controversé, le soulagement de la douleur par le repos peut être conseillé à court terme, mais il l’aggrave à long terme. Autant que possible, il faut poursuivre ses activités et éviter de rester inactif ou même couché. Certes, trop de repos peut aggraver la douleur et provoquer un déconditionnement physique sensibilisant davantage à la douleur et favorisant la chronicité. En cas de douleurs, il faut savoir adapter son activité en fonction de ses capacités. Vous éviterez ainsi d’entrer dans un cercle vicieux de l’inactivité. Bref, vous échapperez à ce que l’inactivité retentit sur vos relations avec votre entourage, sur votre humeur, sur vos loisirs et dans votre travail. Il importe alors de commencer progressivement et augmenter peu à peu ses efforts.
Douleurs inexplicables
Chaque jour, des milliers d’entre nous sont victimes des procédures d’imagerie médicale telles que les rayons X, les ultrasons, la tomodensitométrie et l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Une étude publiée dans le Advanced Physical Therapy Education Institute en 2014 explique que ces procédures d’imagerie peuvent être utiles pour reconnaitre des conditions médicales graves telles que des fractures, des luxations, des lésions de la moelle épinière, etc. Toutefois, celles-ci n’auraient pas de valeurs pour aider à expliquer la plupart des maux et des douleurs, une fois que les médecins auraient écarté les plus graves problèmes. Donc, si vous allez voir votre médecin et celui-ci vous informe que rien ne peut expliquer votre problème, vous faites certainement partie de la majorité.
Des études soutiennent même que les résultats peuvent être nuisibles au point de vue psychologique chez certains patients, atteints par exemple d’arthrite, de disques dégénératifs, de renflements discaux, de déchirures de tendon, etc. En fait, il s’agirait pour un grand nombre de cas de l’usure normale des structures, se produisant à partir de l’âge de 20 ans. Des études ont montré que la dégénérescence discale lombaire est présente chez 40 % des individus âgés de moins de 30 ans et est présente chez plus de 90 % de ceux âgés de 50 à 55 ans (3). Une autre étude a montré que chez les jeunes adultes en bonne santé âgés de 20-22 ans sans maux de dos, 48% avaient au moins un disque dégénératif et 25 % avaient un renflement de disque (4).
Protéger votre dos
Tout d’abord, il importe d’améliorer notre posture. En effet, la manière de se tenir debout et de s’assoir est importante et peut contribuer considérablement à réduire le stress exercé sur notre colonne vertébrale. En position debout, le poids doit être réparti sur les deux pieds afin de maintenir une bonne stabilité et le dos doit montrer la lordose naturelle de la colonne lombaire. D’un autre côté, lorsque vous êtes assis, assurez-vous de vous tenir le dos droit avec idéalement un support pour le bas du dos. Évitez les fauteuils bas trop mous causant une position arrondie. Or, rester assis plusieurs heures par jour vissé à l’écran d’ordinateur ou dans la voiture sur des sièges pas toujours ergonomiques peut rapidement devenir le calvaire pour votre colonne vertébrale. D’où l’importance de veiller au confort de sa chaise et à sa posture. Une chaise devrait être réglable, disposer d’un dossier qui maintient le dos et d’un siège pivotant pour éviter les torsions.
Une autre façon de protéger son dos est de savoir comment manipuler des charges. Très souvent, des troubles s’engendrent avec le port d’une charge trop lourde ou trop volumineuse. Par ailleurs, de nombreux problèmes se développent suite au port d’une charge avec le dos penché et parfois même une torsion exercée sur la colonne. Ces mouvements imposent un stress important. Enfin, une tension beaucoup plus grande est ressentie sur votre dos si vous tenez un objet à bout de bras plutôt que près de votre corps, soit au niveau du centre de gravité.
Rester en forme
Sans aucun doute, la sédentarité n’est pas l’allié de votre dos. Pour prévenir le mal de dos, une bonne précaution consiste à entretenir nos muscles pour leur rôle essentiel dans le maintien de la colonne vertébrale. Cette dernière doit pouvoir être en mouvement correctement et être capable de travailler adéquatement. Pour se faire, la pratique d’activité physique régulière constitue l’une des meilleures mesures préventives. À l’inverse, la sédentarité finit par rouiller nos articulations. Des activités physiques telles que la marche, le vélo, la natation, l’aquaforme permettent de faire travailler un bon nombre de muscles et, ainsi, les faire travailler en endurance. Un programme d’exercices de renforcement musculaire et d’étirements peut également être efficace dans la prévention des maux de dos, mais également dans la réactivation suite à une blessure.
Rappelons-nous que recommencer à bouger rapidement après une lésion au dos permet d’éviter un déconditionnement physique général qui risquerait d’aggraver la situation. Suite à un repos d’un à deux jours, il est recommandé de pratiquer des activités physiques sans excès, adapter celles-ci en fonction de ses capacités et augmenter graduellement l’intensité. Enfin, il est recommandé de débuter par un échauffement d’intensité légère et progressive.
En résumé
Il nous faut admettre que peu importe la nature des maux de dos, il est nécessaire d’apprendre à appliquer les bonnes habitudes, et ce, dans la vie de tous les jours. Combinez les comportements sécuritaires en prévention et menez une vie active afin de mettre toutes les chances de votre côté.
Le mal de dos étant très fréquent, vous n’êtes pas seul à avoir un dos qui pourrait mieux fonctionner. Il s’agit là d’une raison de plus pour réagir, poser des questions et utiliser des pistes de solutions. Trop souvent, bon nombre de gens savent ce qu’il faut faire, mais ne le font pas, ou le font mal. Il est donc parfois nécessaire de recevoir un coup de main. N’hésitez pas à consulter un kinésiologue, un ergothérapeute, un physiothérapeute ou autre professionnel de la santé afin de comprendre les problèmes de dos et mieux les prévenir.
Références bibliographiques
1. Rudwaleit M, Sieper J. Referral strategies for early diagnosis of axial spondyloarthritis. Nat Rev Rheumatol. 2012; 8:262-8
2. http://www.csst.qc.ca/prevention/theme/maux_dos/Pages/dos_ limites.aspx]
3. Cheung KM, et al Prevalence and pattern of lumbar magnetic resonance imaging changes in a population study of one thousand fortythree individuals. Spine (Phila Pa 1976), 2009 Apr 20; 34 (9): 934-40
4. Takatalo J, et al Prevalence of degenerative imaging findings in lumbar magnetic resonance imaging among young adults, Spine (Phila Pa 1976), 2009 Jul 15;34 (16) 716-21
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