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Nutrition

OGM dans votre assiette

Certains aliments du panier d’épicerie peuvent contenir des OGM, ce qui soulève certaines craintes chez le consommateur : sont-ils sécuritaires pour la santé ? Quel est l’impact sur l’environnement ? Permettent-ils une production responsable à long terme?

Émilie Richard1

Les progrès de la science permettent d’améliorer les méthodes de culture pour produire de plus grandes quantités d’aliments, plus efficacement. Ainsi, depuis le début des années 80 la création d’organismes génétiquement modifiés à partir de végétaux fait partie des avancées dans ce domaine. Un OGM est un organisme vivant dont le patrimoine génétique a été modifié par génie génétique pour lui attribuer des caractéristiques qu’il ne possède pas du tout ou qu’il possède déjà, mais à un degré jugé insatisfaisant à son état naturel, ou pour lui enlever ou atténuer certaines caractéristiques jugées indésirables (1).

Les OGM dans le panier d’épicerie

Les quatre plus grandes cultures génétiquement modifiées (GM) qui sont cultivées dans le monde sont le soja, le coton, le canola et le maïs (2). Au Canada, la majorité des grandes cultures de soja, de canola et de maïs sont génétiquement modifiées (2). Ces cultures sont sur tout destinées à nourrir le bétail (2). Il est cependant possible de retrouver des ingrédients faits à partir de plantes génétiquement modifiées dans certains produits transformés. On peut penser par exemple à du sirop ou de la fécule fabriqués à partir de maïs génétiquement modifié. Il resterait peu de matériel génétique dans les produits transformés à partir de plantes GM puisqu’une bonne partie serait éliminée lors de la purification du produit ou détruite par la cuisson ou la digestion (2). Selon une étude effectuée à l’Université Laval en 2009, 2 à 3 % des aliments des épiceries québécoises contiendraient des dérivés d’OGM (3). Dans cette même étude, des dérivés de maïs génétiquement modifiés ont été trouvés dans la farine de maïs et à l’état de traces dans des bis cuits sucrés croustillants et des gâteaux préemballés (3). Des dérivés de soja génétiquement modifiés ont également été identifiés dans des barres de céréales et à l’état de traces dans des gâteaux préemballés (3).

Au Canada, la majorité des grandes cultures de soya, de canola et de maïs sont génétiquement modifiées.

Santé Canada est responsable de la mise en marché des aliments génétiquement modifiés et doit s’assurer de la sécurité pour la santé humaine (4). Le processus d’approbation est cependant critiqué puisque ce sont les compagnies qui produisent elles-mêmes leurs études, bien souvent sur des animaux sur une période de 90 jours, ce qui est trop court pour connaitre les effets à long terme sur la santé (4). Selon une revue de la littérature de 2012, il n’y aurait pas d’effets néfastes à la consommation d’OGM pour la santé humaine ni de potentiel allergène (5).

Il existe actuellement treize plantes GM approuvées à la vente au Canada et un animal (2,6) que l’on retrouve au tableau 1.

Différentes caractéristiques sont visées par la transgénèse de ces aliments. Pour les végétaux, ce sont principalement la résistance aux insectes et la tolérance aux herbicides (2,6). Le saumon AquAdvantage présente une croissance accélérée et atteindrait sa maturité presque deux fois plus rapidement qu’un saumon normal (6). Bien que celui-ci soit approuvé par le gouvernement canadien, certaines grandes bannières comme IGA soulignent sur leur site qu’ils exigent du saumon sans OGM pour la vente dans leurs commerces (8). Il est plutôt difficile de retracer où se retrouverait ce saumon. Est-il congelé ou frais ? Se retrouve-t-il dans des produits dérivés comme des pâtés ou des tartinades ? Ce saumon transgénique risque de faire couler beaucoup d’encre dans les années à venir.

Une distinction importante par rapport aux aliments génétiquement modifiés est que bien qu’ils soient approuvés à la vente, ils ne sont pas nécessairement commercialisés au Canada. Par exemple, en 1995, une espèce de tomate à murissement retardé a rapidement été retirée du marché n’étant pas achetée par les consommateurs critiquant son mauvais gout (2). Bien qu’il y ait treize fruits et légumes GM approuvés, cela ne veut pas dire qu’ils sont commercialisés et qu’ils se retrouvent nécessairement dans nos assiettes. Actuellement, à l’exception du saumon, on ne retrouverait pas d’aliments frais génétiquement modifiés à l’épicerie.

Des cellules de poisson dans les fruits ?

Les fraises ou les tomates vendues à l’épicerie contiennent-­elles des cellules de poisson pour mieux résister au froid ? On ne retrouve pas de tel croisement dans les fruits et légumes des épiceries (2). Certaines recherches effectuent des essais transgéniques de ce genre, ce qui peut laisser croire à certains que ces croisements farfelus se retrouvent dans nos assiettes, mais ces expériences ne sont pas commercialisées.

Impact environnemental

En modifiant génétiquement les végétaux cultivés, on vise à accroitre la production au champ (2). L’utilisation du fameux Roundup de Monsanto permet de protéger les semences GM, mais empêche pratiquement toutes les autres plantes de pousser (9). Cela comporte évidemment des conséquences sur la biodiversité de la flore (9). Le glyphosate que contient cet herbicide contamine les cours d’eau près des cultures utilisant le RoundUp (9).

Tableau 1.

Les aliments GM approuvés à la commercialisation au Canada (2).

Plantes Animal
Maïs-grain Saumon
Riz
Pomme de terre
Tomate
Cotton
Soja
Lin
Canola
Betterave sucrière
Luzerne
Papaye
Courge
Pomme

 

En 2016, 98 % de la production d’OGM se retrouvait dans dix pays, dont la plus grande proportion, soit 40 % de la superficie, chez nos voisins du Sud et 6 % au Canada (2).

Comment réduire sa consommation

Sachant que l’impact de ce type de culture sur l’environnement est lourd et qu’il soulève plusieurs questions éthiques sur le plan de la santé humaine, il est pertinent de minimiser les aliments pouvant contenir des OGM à l’épicerie. Actuellement, il n’existe aucune règlementation obligeant les commerçants à indiquer la présence d’OGM dans leurs produits.

Voici quelques trucs :

  • privilégier l’alimentation biologique, qui interdit l’utilisation des OGM ;
  • éviter les produits transformés dont certains ingrédients peuvent contenir des OGM (maïs, canola, soja) ou opter pour leur version biologique.

Au-delà des OGM, l’utilisation des pesticides que ce soit en agriculture conventionnelle ou des cultures GM, nuit à la faune et la flore ainsi qu’à la santé des producteurs agricoles. Chaque année, la liste des quinze fruits et légumes contenant le moins de pesticides ainsi que les douze fruits en contenant le plus est disponible pour les consommateurs en analysant les résidus se retrouvant sur ceux-ci (10). Le tableau 2 indique ces aliments. Cela peut être une façon intéressante de protéger l’environnement et la santé des agriculteurs.

Tableau 2.

Les fruits et légumes contenant le plus et le moins de résidus de pesticides (9).

La quinzaine contenant le moins de pesticides La douzaine contenant le plus de pesticides
Maïs-sucré Fraise
Avocat Épinard
Ananas Nectarine
Chou Pomme
Oignon Pêche
Les petits pois congelés Poire
Papaye Cerise
Asperge Céleri
Mangue Tomate
Aubergine Poivron
Melon miel Pomme de terre
Kiwi
Cantaloup
Chou-fleur
Pamplemousse

 

Ainsi, il serait préférable d’opter pour la version biologique des fruits et légumes contenant le plus de pesticides puisque ce type d’agriculture en est exempt.

Conclusion

En conclusion, bien que l’Organisation mondiale de la santé considère que les aliments conventionnels représentent les mêmes risques pour la santé que les OGM, l’impact sur le plan environnemental est bien présent (1,2). Est-­ce que l’effet sur la santé sur le plus long terme est le même ? Seul le temps le dira, mais pour l’instant, un pas dans la bonne direction pourrait être de commencer par identifier les aliments contenant des OGM afin d’être en mesure d’effectuer un choix éclairé comme consommateur.


  1. Émilie Richard DT. P.M. SC. Nutritionniste – Diététiste [emilie.richard.nutrition@gmail.com]
Références bibliographiques
  1. Commission de l’éthique de la science et de la technologie. (2003). © Gouvernement du Québec. En ligne : [http://www.ethique.gouv.qc.ca/fr/assets/documents/OGM/OGM-avis-FR.pdf].
  2. Site du gouvernement du Québec. Source d’information sur les aliments génétiquement modifiés.
  3. Gobeil, François et coll. (2009). Incidence des OGM dans les aliments du Québec. Mémoire de thèse présentée à l’Université Laval.
  4. Extenso : [http://www.extenso.org/article/les-ogm-sont-ils-dangereux-pour-la-sante/].
  5. Snell C. et coll. (2012). Assessment of the health impact of GM plant diets in long-term and multigenerational animal feeding trials: a literature review. Food Chem and Toxicology.
  6. Extenso [http://www.extenso.org/article/les-ogm-pour-quoi-faire/].
  7. Extenso [http://www.extenso.org/article/des-ogm-dans-votre-assiette/].
  8. Site de IGA. [https://www.iga.net/fr/implication/achats/peche_responsable].
  9. Lavallée, Bernard. (2015). Sauver la planète une bouchée à la fois. Les éditions La Presse.
  10. Environmental Working Group : [https://www.ewg.org/food-news/list.php#.WlN1tFSdW8o].