L’article 329 de la lamp et la preuve médicale


L’article 329 de la lamp et la preuve médicale

La reconnaissance d’une condition préexistante par la CNESST ou le TAT peut engendrer des gains financiers importants. La Loi prévoit que l’employeur dispose de trois années après l’année de l’évènement pour loger une demande de partage de cout.

Lyse Dumas

Évidemment, une telle demande est possible lorsqu’il y a présence d’une condition préexistante et que cette condition a influencé la survenance ou l’évolution de la lésion.

Vous devrez faire le lien entre la condition personnelle et la lésion à l’aide de preuves médicales vous permettant de confirmer la présence de la condition personnelle et surtout sa relation avec la lésion. Ainsi une expertise par un médecin désigné, des rapports d’investigation radio logique, un protocole opératoire, l’existence d’un dossier antérieur similaire chez un autre employeur, etc., sont tous des éléments de preuve.

Vous devez donc vous assurer l’accès au dossier médical que possède la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) par le biais d’un médecin que vous désignerez à cet effet. Il pourra ainsi procéder à l’évaluation du contenu médical du dossier et vous émettre une opinion sur la pertinence de l’application d’un partage et le motif à invoquer.

Le travailleur peut également accepter de vous donner accès à des informations médicales qui ne sont pas en lien avec l’évènement, mais qui démontre un suivi médical antérieur ce qui aide à faire la preuve de la condition personnelle et possiblement plaider une aggravation de cette condition au travail.

Un examen pré-embauche demeure un excellent outil vous permettant de connaitre la situation de santé du travailleur. Il n’est pas rare de réaliser qu’un travailleur embauché était porteur de limitations fonctionnelles permanentes et que l’employeur l’ignorait. Ainsi, dans l’éventualité où une lésion survient ultérieurement, vous serez déjà muni d’un avis initial sur la condition personnelle.

Toutefois, la preuve du lien entre la condition préexistante et la lésion devient de plus en plus stricte. À ceci s’ajoute la notion de condition hors norme biomédicale qui, advenant que la demande soit traitée par le Tribunal administratif du travail (TAT), devra être démontrée médicalement. Il ne suffira pas d’une simple expertise où l’expert médical se prononce. Son opinion doit se reposer sur des critères objectifs démontrés par des études pertinentes. Par exemple, s’il avance une statistique pour une tranche d’âges, il doit citer sa source et joindre l’étude à son rapport. Pour le TAT, la seule mention par un médecin expert qu’il y a une condition personnelle qui est hors norme n’est pas suffisante.

Il vaut donc la peine d’investir dans une opinion d’expert médical qui va faire la preuve médicale que la condition préexistante est anormale compte tenu de l’âge du travailleur. Plusieurs motifs peuvent être allégués afin de loger la demande de partage de cout, mais l’argumentation doit faire un lien entre la condition personnelle et la lésion, et ce, selon qu’elle en est la cause principale, le motif pour lequel la consolidation a été prolongée ou la raison de la gravité de la lésion.

L’impact financier d’une décision octroyant un partage de cout est toutefois limité pour certains dossiers. Ainsi, dans l’éventualité où le travailleur ne reviendrait jamais au travail et que des indemnités seraient versées par la CNESST pendant une longue période, l’impact du pourcentage qui sera attribué devient important du fait des sommes restantes au dossier du travailleur après l’application de la
décision.

Lorsque des indemnités de remplacement du revenu sont versées par la CNESST, après le 30 septembre de la deuxième année de la réclamation (exemple 30 septembre 2017 pour une lésion de 2016), il y a application de facteurs de chargement qui auront un impact significatif sur la valeur réelle de la réclamation. Dans une telle situation, selon le régime de tarification en vigueur, l’impact d’un partage de cout sur la cotisation de l’employeur peut varier entre négligeable et significatif. Nous encourageons donc une analyse spécifique de chaque situation, pour bien mesurer l’impact.

Il convient de porter en appel une décision de la CNESST qui reconnait un partage de cout insuffisant. La jurisprudence du TAT démontre que fréquemment, le pourcentage attribuable est évalué différemment par le TAT et la CNESST (1).

1. La CSST a décidé que le partage de cout reposait uniquement sur la prolongation de la lésion professionnelle. Elle en est arrivée à un pourcentage de 20 % en considérant que pour une déchirure de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, tel qu’est le diagnostic retenu pour la lésion professionnelle du travailleur, la durée moyenne de consolidation est de 77 jours alors qu’il en a fallu 373 dans le présent cas.
2.Or, la jurisprudence unanime du tribunal est à l’effet qu’il ne faut pas considérer uniquement la période de consolidation d’une lésion professionnelle, mais toutes ses conséquences, dont entre autres la reconnaissance d’une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles, l’admissibilité en réadaptation, la poursuite du versement d’une indemnité de remplacement du revenu.
Cette omission de la part de la CSST de considérer les autres conséquences d’une lésion professionnelle justifie que la décision rendue soit infirmée.

En résumé

Une demande de partage de cout peut exiger un investissement dans une opinion médicale de qualité. Par contre, une argumentation médicale bien faite vous assure d’une plus grande probabilité de gain auprès de la CNESST, mais surtout du TAT.

N’hésitez pas à contester un pourcentage accordé par la CNESST particulièrement lorsque le travailleur demeure avec des limitations fonctionnelles permanentes qui vont engendrer une réadaptation externe. Considérant la procédure de la CNESST qui diffère de la position du tribunal (TAT), une représentation auprès du tribunal lorsque le partage obtenu est insuffisant peut engendrer des gains importants.