ENJEUX DE LA SST

L’Avenir de la SST au Québec PARTIE 2

Ulysse Mc Carthy1

Six panélistes experts ont été invités à discuter des principaux enjeux présents et futurs de la SST au Québec. C’est ainsi que des pionniers de la SST ont débattu avec des représentants de la nouvelle génération de professionnels dans le domaine autour de six différents thèmes.

Le 18 octobre 2018 se tenait une table ronde sur l’avenir de la SST au Québec. Cette table ronde avait été organisée par le Réseau d’échange en Santé, Sécurité et Environnement (RESSE) avec la collaboration de la revue Travail et santé et la participation spéciale de l’AQHSST. Dans l’édition de mars dernier, de la revue Travail et santé (1), nos panélistes ont brossé un tableau du bilan des 30 dernières années de SST au Québec et poursuivi leurs réflexions sur l’avenir de la profession. Voyons ce qu’ils ont à nous dire concernant deux autres thèmes.

Thème 3 : Les mutuelles de prévention

Les mutuelles de prévention remplissent-elles vraiment leurs fonctions de prévention pour lesquelles elles ont été créées ? Ont-elles tendance à ne devenir qu’un outil de minimisation des couts de financement, sans plus ? Combien de fois avons-nous constaté des risques non gérés en entreprise qui font pourtant partie d’une mutuelle de prévention ? De grands questionnements que les panélistes ont débattus pendant plusieurs minutes.

Qui a eu cette idée folle ?

Me Archambault, rappelle que la création des mutuelles de prévention fut une excellente idée. De fait, c’est la sienne ! Les mutuelles, il y croit vraiment beaucoup. Il commence par rappeler que les 65 % de réductions des lésions professionnelles constatées au Québec ne proviennent pas des 500 entreprises au Québec qui sont au régime rétrospectif, mais bien des 29 000 entreprises que sont en mutuelle de prévention. C’est peu dire. Par contre, selon lui, il ne faut pas se mettre la tête dans le sable. Lorsque les mutuelles de prévention ont vu le jour, des entrepreneurs ont flairé là une belle occasion de lancer des entreprises fort rentables. Leurs vendeurs se sont lancés à la chasse aux candidats afin de grandir leur bassin de clients et mutualiser un grand nombre d’entreprises. Le problème c’est que par la suite, ils n’ont pas livré la marchandise. Les mutuelles ont permis de contrôler le cout de leurs factures à la CNESST, mais n’ont en rien diminué les risques d’accident pour les travailleurs. Par contre Me Archambault tient à souligner qu’il existe d’excellentes mutuelles qui font un très bon travail en termes de prévention.

Campagne d’éducation

Il existe présentement plus de cent mutuelles de prévention différentes. Un employeur qui a intérêt à se mutualiser ne peut donc pas étudier toutes les options afin de choisir celle qui lui convient. Dans le futur, il faut entamer un vaste projet d’éducation et d’accompagnement pour aider les entreprises mutualisées à obtenir les services dont elles ont vraiment besoin et pour lesquelles elles paient le gros prix en frais de gestion. Il faut aussi leur expliquer que certains employeurs ne doivent pas faire partie d’une mutuelle. Me Archambault souligne avoir vu des employeurs mutualisés n’ayant aucune réclamation, mais qui paient des honoraires pour leur donner un indice de risque de 1.11. Cela veut dire que ces entreprises paient des honoraires pour perdre 11 % de leurs cotisations.

Les services de prévention

Le problème, il faut se le dire, c’est que pour demeurer en affaire, la mutuelle se doit d’être performante. Mais cela ne doit pas se faire en minimisant les services de prévention aux entreprises membres ou en appliquant des programmes de prévention clé en main pré écrits.

De plus, pour être performantes, les bonnes mutuelles vont exclurent les mauvais employeurs. Ceux-ci se retrouvent forcément concentrés dans les mauvaises mutuelles, et c’est là que le bât blesse. Pourtant, lorsque les mutuelles de prévention permettent une plus grande personnalisation de la bonne performance tout en minimisant les risques en sauvant les accidents, elles font le travail pour lesquelles elles ont été conçues.

Mutuelle de contestations

M. Pérusse rappelle que la grande majorité des mutuelles de prévention ont vu le jour en premier lieu pour effectuer de la gestion médico-administrative de masse. Pis encore, elles sont devenues des machines à partage de couts. On les appelait d’ailleurs ironiquement les mutuelles de contestations, c’est peu dire.

Me Archambault réitère que les mutuelles de prévention demeurent des véhicules valables, car, lorsqu’elles font vraiment de la prévention, il n’est pas rare de les voir afficher des résultats de 30, 40 et même 50 % inférieurs au taux moyen. Cela est de la performance en santé et sécurité, qui ne peut être obtenue uniquement que par une gestion médicoadministrative agressive.

Revoir le concept

M. Vézina souligne que si nous partons sur le principe que la Loi sur la santé et la sécurité (LSST) a été bâtie sur les principes de prévention à la source, il faut faire en sorte que les accidents ne se réalisent pas. Et pour cela, il faut revoir les outils de prévention notamment les mutuelles de prévention. Les mutuelles sont devenues des patchs pour corriger les manquements du régime de financement. Il est d’avis que ce régime devrait être revu. Tous les partages de couts que les employeurs appliquent sur des dossiers d’accidents sont transférés aux autres employeurs. Aussi bien dire que les bons employeurs refilent la facture aux moins bons. Le constat actuel sur la vocation des mutuelles de prévention n’est pas la cause du problème, mais en est un symptôme. Le symptôme d’un régime qui ne traite pas de vrais problèmes. Selon lui, les modes de fonctionnement des mutuelles de préventions devraient être mieux encadrés.

Copier-Coller

M. Pérusse est plutôt d’avis qu’avant de revoir les outils prévus par la LSST, il faudrait, tout d’abord savoir les appliquer convenablement. Combien d’entre vous avez un vrai programme de prévention spécifique à son établissement, comme prévu par la loi ? Tous s’entendent, malheureusement, pour dire qu’il y en a très peu. Est-ce que le terme de copier-coller vous rappelle quelque chose ?

Une participante de l’assemblée mentionne que des vérifications systématiques ont été réalisées par la CNESST dernièrement dans la région des Laurentides et beaucoup d’entreprises mutualisées n’avaient pas de programme. Elles ont alors été exclues des mutuelles par manquement à la Loi. Encore pire, lorsqu’on examine la qualité du programme de prévention des autres, on constate qu’il représente en réalité un manuel de santé et sécurité 101 de ce qu’il est bien d’appliquer dans certaines circonstances. On est très loin d’un programme de prévention spécifique à l’établissement.

Privatisation de l’inspection

Pour cette participante, les mutuelles de prévention s’apparentent à la privatisation des fonctions d’inspection. Voyez-vous, c’est que les mutuelles de prévention doivent inspecter annuellement tous les membres. Puisqu’il n’y a pas assez d’inspecteurs de la CNESST pour forcer les employeurs à faire ce qu’ils ont à faire, ceux-ci ont tendance à visiter plus souvent les entreprises non mutualisées. Puisque le régime de la CNESST est basé sur un modèle incitatif, l’avenir passe par une formation continue auprès des PME. Et c’est exactement à eux que les mutuelles s’adressent. Ces PME qui, autrement, ne feraient pas de prévention.

Déresponsabilisation des mutualisés

Les entreprises membres d’une mutuelle s’attendent à être encadrées et inspectées par celle-ci. Elles ont tendance à se déresponsabiliser sous la cape de la mutuelle. Ces entreprises qui paient le service d’une mutuelle s’attendent à ce qu’elle lui indique quoi faire. Si la mutuelle ne dit rien, c’est que tout va bien. Lorsque les mutuelles appliquent un modèle de gestion minimaliste, les travailleurs sur le terrain peuvent être en danger.

Pouponnière de mutuelle ou le purgatoire

Connaissez-vous la pouponnière des mutuelles de prévention ? Lorsqu’un employeur n’a pas les résultats suffisants pour adhérer à une mutuelle de prévention, car il affecterait négativement sa performance, celle-ci peut lui offrir des services pour améliorer sa performance. L’entreprise doit alors passer au purgatoire et améliorer sa performance en SST afin d’y adhérer éventuellement. C’est ici un grand incitatif qui a des retombées positives sur la qualité de vie au travail des employés.

Les associations sectorielles paritaires

Un participant de l’assemblée rappelle que pour remplir le mandat de support à l’amélioration de la SST dans les entreprises, les associations sectorielles paritaires ou ASP sont toutes désignées pour cette tâche. Or on constate qu’elles sont peu utilisées. Me Archambault indique que cela s’explique aisément. Les ASP ont le même mandat de support auprès des entreprises, mais sont moins populaires que les mutuelles, car il manque l’effet de la carotte sur un bâton pour inciter les employeurs. Une participante, qui a travaillé dans une grande ASP, mentionne qu’il y a beaucoup de situations problématiques actuellement au niveau des ASP. Celles-ci ne sont généralement pas dans un mode de fonctionnement basé sur l’efficacité. Selon elle, tout comme la CNESST, elles sont prises dans une bureaucratie qui est révolue et qui ne fonctionne plus. Ce qui est le plus frustrant à ses yeux c‘est qu’on a un réseau incroyable pour être capable de faire des changements dans le système et avoir un impact positif pour les entreprises en termes de SST mais, qui est incapable de s’avancer et de s’adapter à la réalité d’aujourd’hui.

Thème 4 : Élimination des risques à la source

Dans les années 80, la prévention des risques était basée sur une approche ressource humaine et centrée sur l’élimination des dangers à la source. Depuis les années 2000, la prévention a pris un virage très procédural, voire même technocratique. Très souvent les actions de prévention se limitent à fournir un équipement de protection individuel adéquat ou de diffuser de la formation, souvent bien générique, aux membres du personnel. Comment faire valoir alors la prévention à la source ? Comment devrait-on aborder la SST  dans les prochaines années ? Quelles sont les orientations à prendre pour revenir à l’essence de la Loi ? Autant de questions auxquelles ont tenté de répondre les panélistes lors de la discussion autour du quatrième thème : l’élimination des risques à la source.

Le voile corporatif

M. Tartre lance le débat. Il rappelle en premier lieu que les procureurs ont la possibilité de lever le voile corporatif et d’aller directement incriminer les individus dans le cas où il y eut absence de diligence raisonnable en regard de la prévention. Il se souvient qu’en 1988, il assistait à une formation sur les risques en milieu public diffusée à Ottawa où deux participants lui avouent à quel point leur travail est ennuyeux. Leur fonction : réviser les plans d’architecte concernant la réglementation des éléments de sécurité dans les gratte ciels au Canada. Cela est ainsi, car les plans sont toujours conformes, et ils se sentent bien inutiles. Mais pourquoi êtes-vous si certains que les plans seront toujours conformes ? Voyez-vous, c’est qu’en 1960 sont apparus les premiers gratte-ciels au Canada et en même temps la réglementation fédérale sur la sécurité dans les édifices en hauteur. Et une fois, mais juste une fois, l’inspecteur est passée après la construction du bâtiment et a dû annoncer au propriétaire que l’escalier n’était pas à la bonne place. Imaginez les discussions qui ont suivi ! Pour M. Tartre, la loi C-21 et le fait qu’on peut lever le voile corporatif pour poursuivre au criminel un individu vont créer le même effet en matière de SST que l’évènement marquant d’un escalier qui n’était pas à la bonne place dans le domaine de la sécurité des bâtiments. Cela va sensibiliser les intervenants et ramener l’essence de la prévention à sa juste valeur.

Un extra-terrestre

M. Tartre souligne qu’au début de l’an 2000, lorsqu’il demandait à un entrepreneur qui devait enlever des réservoirs souterrains d’inclure un dispositif anti-affaissement, il passait pour un extra-terrestre. Dix-neuf années se sont écoulées et on ne voit presque plus d’excavation sur un chantier de prévention qui n’en est pas pourvu. Pourquoi ce changement ? N’est-ce pas relié à la poursuite criminelle de S. Fournier Excavation Inc. ? (2) Dans le futur, les causes à venir vont servir de levier pour dresser les limites de ce qui est acceptable et nous permettre de retourner à la base : la préventiondes dangers à la source.

Homicide involontaire

Mme Côté, rappelle que M. Fournier n’a pas seulement été accusé de négligence criminelle ayant causé la mort, mais bien d’homicide involontaire. C’est bien plus grave. Juste au plan
humain, imaginez la scène : M. Fournier était dans l’excavation avec son beau-père et le pire arriva. Aujourd’hui, malgré son âge, il fera un an et demi de prison.

C’est l’éducationqui fait la différence

Me Archambault nous rappelle qu’en matière de SST, l’éducation et la formation font toute la différence. La société a adopté la loi C-21. Plus les causes évolueront et plus la haute direction se réveillera concernant l’obligation de l’employeur de permettre aux travailleurs d’oeuvrer en toute sécurité.

M. Dallaire est convaincu que tous les employeurs ont pris connaissance des dispositions de C-21, mais ils ne semblent pas réaliser que ça peut leur arriver et l’impact que cela peut avoir sur eux. Ils sont tous convaincus qu’ils font le nécessaire en matière de prévention. Il est d’avis que, tout comme dans la société le Premier ministre est celui qui devrait s’occuper de l’environnement, c’est le Directeur général qui devrait porter le Leadership de la SST et non le coordonnateur SST. C’est à la haute direction de donner tous les outils nécessaires au responsable de la SST pour assurer la sécurité des employés.

La solidarité en matière de SST

Mme Côté spécifie qu’on parle beaucoup des employeurs, mais il ne faut pas oublier les obligations des travailleurs. L’employeur et les travailleurs sont solidaires en matière de SST. Elle voit trop souvent des travailleurs refuser de prendre au sérieux l’analyse de risques qu’on leur demande de réaliser. Pourtant c’est une étape préliminaire importante à exécuter avant d’entreprendre les travaux demandés. Elle a été témoin de travailleurs seniors qui envoient des nouveaux dans une excavation sans leurs équipements de sécurité. Le superviseur à un rôle et c’est évident, mais il ne peut être présent partout et en tout temps. Il doit compter sur la participation de tous.

Bulle de protection

Me Archambault se questionne. Pourquoi la Commission, si elle est capable d’aller chercher un employeur récalcitrant, ne pourrait faire de même avec les travailleurs ayant des comportements dangereux avec eux-mêmes ou envers ses collègues ? Ils semblent se sentir à l’abri comme dans une bulle de protection. Mme Côté a l’impression que les travailleurs assument que la SST est la responsabilité de l’employeur et que cela justifie qu’ils ne fassent rien en prévention. M. Vézina souligne que c’est là que le paritarisme a manqué sa cible. Il existe seulement lors de la prise de décision, mais pas pour être imputable de sa propre sécurité. Il a vu une seule fois un travailleur recevoir une amande de la CNESST.

Et cela doit s’appliquer

Il y a quelques années, on voyait une publicité de la CNESST très orientée vers l’employeur. Chaque fois que M. Vézina la visionnait, il ne pouvait s’empêcher de rajouter et cela doit s’appliquer. Les organisations conçoivent de bonnes pratiques, on enseigne aux travailleurs les méthodes sécuritaires, mais ils doivent les appliquer. Quand l’organisation les a formés, que les superviseurs les ont coachés et que la direction les a rencontrés trois fois, mais qu’ils n’appliquent toujours pas les bonnes méthodes reconnues par l’employeur que doit on faire ? Avez-vous été témoin d’une amende à un travailleur en vertu de l’article 49 de la LSST ? Mme Côté avoue l’avoir vu plusieurs fois, en Ontario… M. Vézina conclut qu’au Québec, on est moins, car on est moins rigoureux qu’ailleurs au Canada, c’est là la faiblesse de notre régime.

Un participant de l’assemblée, représentant syndical dans une multinationale dont le siège social est aux États-Unis, se demande comment leurs faire comprendre la réalité locale et arriver à faire vivre les programmes de prévention. Il est aussi d’avis qu’il faut un changement de culture afin d’amener les travailleurs à s’impliquer davantage. Il souhaite que l’on puisse soutenir les jeunes gestionnaires en SST. Il voudrait éviter qu’ils ne se retrouvent face à d’anciens paradigmes, notamment l’imputabilité des travailleurs, les conflits trop fréquents employeurs-travailleurs et le syndrome de Monsieur SST.

Me Archambault rappelle que prendre des mesures disciplinaires lorsqu’il y a violations des
règles de sécurité fait partie de la diligence raisonnable des dirigeants d’entreprises. M. Pérusse ajoute que c’est son devoir d’autorité.

Un exemple de succès

Un autre participant de l’assemblée, coordonnateur SST dans une grande municipalité, parle de son expérience personnelle. Il souligne que suite à un grand travail de sensibilisation et d’éducation concernant l’étançonnement des tranchées et excavation, la CNESST c’est mise à féliciter l’organisation au lieu réprimander celle-ci. La culture a changé à un point que, si les travailleurs de la municipalité se retrouvent confrontés à une excavation non étançonnée faite par un entrepreneur privé, ils refusent d’y descendre. Il conclut qu’il est possible de procéder à un changement de culture en SST.

L’autorité d’arrêt de travail

Un troisième participant parle de l’autorité d’arrêt de travail. Il souligne que lorsqu’on parle de prévention à la source on oublie souvent un aspect important. Il faut aussi tenir compte des risques qui surviennent alors que les évènements ne se déroulent plus comme prévu. C’est là que l’improvisation cause des accidents. Si l’organisation implante une culture qui reconnait à quiconque l’autorité, d’arrêter le travail s’il croit sincèrement que l’intégrité des travailleurs est en danger, le pire sera alors évité. Il ajoute que les travailleurs savent comment faire leur travail. Ils sont formés et qualifiés mais, dans des situations imprévues et face aux facteurs extérieurs, ils ne réagissent pas tous de la même manière. C’est pour cela que des programmes comme STAR ont vu le jour. Savoir s’Arrêter, Traiter l’information, Agir en toute sécurité et Réviser la situation oblige à se remettre en question. Cela permet de décider de notre niveau de compétence face à la situation. L’autorité d’arrêt de travail, ce n’est pas d’arrêter le travail, c’est de suspendre temporairement le travail pour faire un pas de recul et voir comment s’y prendre de façon sécuritaire. Le participant est d’avis que tous les travailleurs devraient être formés pour savoir bien réagir.

Déculpabiliser ou déresponsabiliser

M. Pérusse rappelle que l’intention du livre blanc de déculpabiliser les parties était correcte. Il ne sert à rien de rechercher des coupables parce que les gens ont tendance alors à se
protéger et dans pareil cas on ne peut jamais aller au fond des choses. Mais en en misant sur la déculpabilisation, on s’est retrouvé malencontreusement à déresponsabiliser les parties du même coup. La culture en SST passe par une responsabilisation des employés. Oui ça s’implante Top-Down, mais, en même temps, une culture est un ensemble de valeurs, d’attitudes, d’habitudes, de comportements et parfois même d’artefacts partagés par un grand nombre de personnes dans une même organisation souligne M. Pérusse. Il rajoute que, pour que ça fonctionne, il faut aussi que ça vienne de la base également, des travailleurs. Il définit d’ailleurs la responsabilisation comme étant de pouvoir recourir de manière accrue à l’intelligence de nos employés pour qu’ils prennent des initiatives pour corriger les situations dangereuses qu’ils rencontreront dans le cadre de leurs travaux. Initiatives pour lesquelles on leur donne du pouvoir et des ressources, mais pour lesquelles on les tient imputables.

Pour conclure, M. Tartre rappelle que tout ce qui fut dit dans ce thème s’applique très mal dans des milieux non syndiqués et dans des petites entreprises. Il déplore qu’on ait tendance à oublier ces travailleurs. Il ne faut pas perdre de vue que protester dans une petite entreprise, même en matière de SST, peut parfois couter son emploi.

Le meilleur est l’ennemi du bien

Un participant déplore finalement qu’en matière de sécurité on en fasse parfois trop : tenir la rampe, trois points d’appui, etc. Souvent une organisation n’hésitera pas à écrire des procédures de 15 pages que personne ne lira jamais. C’est juste trop. Faites des pense-bêtes qui seront appliqués et voilà le résultat, affirme-t-il. Les meilleurs règlements en SST, sont ceux qui sont faits par ceux qui vont les appliquer, ajoute M. Pérusse. Mme Côté trouve que c’est tellement vrai. Elle souligne que si le principe de précaution est si largement répendu c’est que les gens ne savent pas assez analyser les risques correctement. Du coup, on en ajoute trop, pour être sûr de rester dans le facteur de sécurité. Parfois le meilleur est l’ennemi du bien.

Une finale optimiste

Pour ma part, je considère qu’il faut rester optimiste concernant la capacité des acteurs à réinventer la façon de gérer la SST dans le futur au Québec. Il est réaliste de croire que les entreprises sauront trouver de nouvelles organisations qui pourront les accompagner dans leur cheminement. Ainsi, grâce à ces incubateurs de succès, les organisations pourront passer du changement de la culture à la culture du changement.

Dans le prochain numéro, découvrez ce que pensent nos panélistes des risques psychosociaux et du rôle des professionnels en SST dans le futur.

Il vous est possible de visionner des extraits vidéo de la table ronde en consultant la chaîne YouTube de la Revue Travail et santé [https ://www.travailetsante.net/les-enjeux-sst partie-2] ou la section Conseil du site web d’Opérations SST international [https : //www.operationsst.com/fr-ca/conseils/blogs/].


1 – Ulysse Mc Carthy – 1. DIRECTEUR GÉNÉRAL, OPÉRATIONS SST INTERNATIONAL INC. ENSEIGNANT À L’INSTITUT DES PROCÉDÉS INDUSTRIELS DU COLLÈGE DE MAISONNEUVE
PRÉSIDENT DU RÉSEAU D’ÉCHANGE EN SANTÉ SÉCURITÉ ENVIRONNEMENT (RESSE) PROFESSIONNEL DE LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ
[umccarthy@operationssst.com]

Références bibliographiques

    1. Mc Carthy, Ulysse : L’Avenir de la SST au Québec-Partie 1, Travail
      et santé vol. 35 no 1, mars 2019.
    2. R. c. Fournier, 2018 QCCQ 1071.