MOT DU REDACTEUR SCIENTIFIQUE – Le bruit dans tous ses états


MOT DU REDACTEUR SCIENTIFIQUE – Le bruit dans tous ses états

Michel Gérin

En consultant le tout récent Programme national de santé publique du Québec (1) j’ai appris que le nombre de nouveaux cas de surdité professionnelle acceptés par la CSST aurait plus que doublé entre 2003 et 2013. Le bruit en milieu de travail est donc plus que jamais un problème d’actualité. D’ailleurs la succession de deux textes sur le sujet dans les pages scientifiques de notre revue le montre à sa façon. Les travaux d’Alexis Martin et Jérémie Voix portent sur le développement d’un bouchon d’oreille numérique « intelligent », efficace en protection sonore, mais aussi en mesure de laisser passer les signaux utiles tels que les alarmes ou la parole et, également, de surveiller dans le con duit auditif des biosignaux indicateurs de malaises ou d’accidents subis par le porteur (2). Une discussion récente avec mon garagiste en plein vacarme d’installation de pneus m’a convaincu de la pertinence d’un tel projet !

Quant à la recherche présentée par Véronique Vaillancourt et collaborateurs elle prend acte du fait que de nombreux travailleurs exposés au bruit sont aussi des porteurs habituels de prothèses auditives (3). Ces travailleurs ainsi que les professionnels de santé amenés à les conseiller sont préoccupés des risques auditifs potentiels reliés à la suramplification du signal bruyant par la prothèse, et des problèmes de communication et des risques à la sécurité si elle n’est pas portée. Il ressort de l’article qu’il s’agit d’une réalité fréquente, mais qu’il manque de méthodes et d’outils pour gérer ces situations.

Un dernier mot sur le bruit et ses méfaits. Au risque professionnel s’additionne en effet le risque hors travail. Un avis récent de l’INSPQ nous apprend que près d’un Québécois sur 10 âgé de 15 ans ou plus se trouve exposé, à l’extérieur du travail, à des niveaux de bruit nuisibles d’origines diverses (bruit routier, aérien, ferroviaire, musique forte…), sources notamment d’effets sur l’audition, de maladies cardiovasculaires et de perturbations du sommeil (4). À Montréal une autre recherche, pilotée par Audrey Smargiassi, a montré que les plus défavorisés étaient aussi les plus exposés au bruit mesuré dans l’environnement urbain (5). Le bruit est donc un fléau complexe et bien présent. Il faut vraiment encourager les  équipes de chercheurs et d’intervenants dans nos universités et organismes publics à poursuivre leurs travaux, tout en y incluant également les méthodes de réduction à la source.

Bonne lecture